Nous avons déjà tous entendu parler des perturbateurs endocriniens. Mais que sont-ils vraiment et quels sont leurs effets sur notre santé ?
Selon l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), un perturbateur endocrinien (PE) est une substance chimique d’origine naturelle ou synthétique, étrangère à l’organisme, qui est susceptible d’interférer avec le fonctionnement du système hormonal, c’est-à-dire des cellules et organes impliqués dans la production des hormones
Les perturbateurs endocriniens peuvent se retrouver dans l’air intérieur à partir de diverses sources, telles que les produits ménagers (produits d’entretien, lessives, savons…), les meubles (neufs), les revêtements de sol, les produits d’isolation, les cosmétiques (maquillage, crème, vernis à ongle, dissolvant, shampoing…), l’alimentation (revêtement anti-adhésif des casseroles, poêles et ustensiles de cuisine…) et les jouets.
Focus sur une initiative innovante, lancée en septembre 2022 par nos Conseillères Médicales en Environnement Intérieur (CMEI), en partenariat avec le Service Protection Maternelle Infantile de la Côte-d’Or (PMI 21*) pour sensibiliser les professionnels du service et les familles bénéficiaires à la question des polluants de l’environnement intérieur, dont les perturbateurs endocriniens.
Nous avons interviewé Laure Pressouyre, CMEI et Lou Greffet Vitrey, chargée d’études et d’évaluation au sein de nos équipes de la Mutualité Française Bourgogne-Franche-Comté.
Quel est le rôle d’une Conseillère Médicale en Environnement Intérieur (CMEI) ?
Laure : « Notre mission principale est, sur prescription du médecin spécialiste, de réaliser une visite du domicile des personnes souffrant de maladies respiratoires, allergiques. Nous faisons un diagnostic des risques liés à l’environnement de vie de ces personnes. Nous recueillons des informations telles que : le taux d’humidité, la performance du système de ventilation, le type de chauffage utilisé, les habitudes d’aération et d’entretien du logement, la recherche de polluants biologiques et chimiques. Nous conseillons les patients afin d’obtenir une éviction optimale des allergènes et polluants. »
*PMI21 : Le service de protection maternelle et infantile (PMI) est un service départemental, placé sous l’autorité du président du conseil départemental et chargé d’assurer la protection sanitaire de la mère et de l’enfant
Comment est né le projet en co-construction avec la PMI 21 ?
Laure : « Le Service de PMI de la Côte-d’Or nous a sollicité début 2022 pour développer une action innovante en prévention, en direction des familles bénéficiaires des services de la PMI. La question des perturbateurs endocriniens est venue naturellement, avec la volonté de sensibiliser les familles à ce sujet le plus précocement possible. Depuis janvier 2022, nous travaillons en co-construction, pour bâtir un projet en trois phases qui répond aux besoins des familles accompagnées et des professionnels de la PMI :
- Une phase exploratoire : pour effectuer un diagnostic auprès des professionnels de la PMI et des familles afin de recueillir leurs besoins (de septembre à décembre 2022)
- Une phase de formation : pour former les professionnels de la PMI 21 à la problématique des perturbateurs endocriniens (de janvier à mars 2023)
- Une phase de sensibilisation: pour sensibiliser les familles à la question des polluants de l’environnement intérieur (de avril à décembre 2023) ».
De quelle manière avez-vous mené la phase exploratoire « La santé environnementale dans les habitudes de vie des familles et dans les pratiques professionnelles » ?
Lou : « Nous avons interrogé 64 professionnels de santé de la PMI sur leurs connaissances, leurs pratiques et leurs besoins relatifs à la santé environnementale. Il s’avère que 72% des professionnels du service de la PMI expriment n’avoir jamais été formés à la santé environnementale, alors que 80% d’entre eux manifestent un intérêt élevé pour la thématique.
Nous avons également mené une enquête auprès de 91 familles (en zone rurale et urbaine) bénéficiaires du service de la PMI 21, concernant leurs pratiques quotidiennes au sein de leur logement : cuisine & alimentation, qualité de l’air intérieur, entretien ménager et le change du bébé. Après analyse, nous avons observé que certaines bonnes pratiques sont déjà bien ancrées, notamment en l’aération du logement. Mais nous observons tout de même des marges de progression nécessaires dans tous les domaines, et particulièrement concernant les produits utilisés pour le change du bébé, l’utilisation de nombreux parfums ou bougies d’ambiance, d’ustensiles de cuisine en plastique…
Ces questionnaires nous ont permis d’identifier les besoins et les freins des professionnels et des familles, et donc de construire des formations et sensibilisations en s’adaptant à leurs réalités de terrain».
Comment se déroule la phase de formation pour sensibiliser et former les professionnels du service PMI à la problématique des perturbateurs endocriniens ?
Laure : « Les professionnels du service de la PMI sont les premiers relais auprès des familles bénéficiaires. Il est donc essentiel qu’ils soient formés à la question des perturbateurs endocriniens. À la suite de la phase exploratoire, nous avons donc mis en place une formation qui a pour objectif de transmettre aux professionnels les bons réflexes d’identification des sources de perturbateurs endocriniens auxquelles les familles peuvent être exposées. La formation est bâtie autour d’éléments théoriques pour comprendre les enjeux et d’une partie pratique pour apprendre à bien conseiller les familles sans jugement. Cette formation a également pour but d’impulser une nouvelle dynamique aux méthodes professionnelles, pour pérenniser les bons réflexes. 68 professionnels de la PM1 21 seront formés entre janvier et mars 2023, en coanimation avec Orane Leroy-Rivierre, médecin de santé publique du service de la PMI.
La prochaine étape sera la phase de sensibilisation, qui commencera au printemps 2023, et qui nous permettra de sensibiliser les familles, via les professionnels du service de la PMI 21 ».
Nous tenions vraiment à remercier le service de la PMI du Conseil Départemental de Côte-d’Or pour avoir consacré du temps à établir ce diagnostic de besoins. Nous saluons particulièrement leur engagement en faveur de la santé environnementale, qu’ils ont porté avec diligence et conviction en interne. C’est un réel plaisir de travailler avec leurs équipes.
Plus d’infos sur le service Protection Maternelle Infantile du Conseil Départemental de Côte-d’Or : https://www.cotedor.fr/annuaire/service-protection-maternelle-et-infantile