Contrat des mutuelles : les députés adoptent la taxe Fillon

L’Assemblée nationale a voté le mercredi 7 septembre en début de soirée le doublement de la taxe sur les contrats de santé des mutuelles. L’opposition dénonce « un choix injuste » et une « atteinte à l’accès aux soins ».

La majorité parlementaire n’a pas voulu entendre les arguments des  mutuelles ! Lors de l’examen du projet de loi rectificatif pour 2011,  les députés ont adopté le mercredi 7 septembre, en début de soirée,  l’article 3 portant de 3,5% à 7% la taxe sur les conventions d’assurance  (TCA) par 130 voix pour et 84 voix contre. Et ce, malgré les mises en  garde répétées par l’opposition sur les conséquences néfastes d’une  telle mesure.

Ainsi, le président du groupe socialiste, Jean-Marc  Ayrault (Loire-Atlantique) a fustigé la « double peine » dont seront  victimes les classes moyennes et les plus modestes de nos concitoyens :  « C’est le pouvoir d’achat qui va être atteint, ainsi que l’accès aux  soins. » Pour Jean-Pierre Brard (Gauche démocratique et républicaine,  Seine-Saint-Denis), cette hausse constitue une remise en cause du droit à  la santé car elle va inévitablement se traduire par un « renchérissement  des couvertures complémentaires ». Dans un bel élan, ce député a  d’ailleurs appelé les adhérents des mutuelles « à la résistance » !

« Les  mutuelles vont inévitablement répercuter cette hausse sur les  cotisations. Pensez aux gens qui vont devoir se soigner », a lancé à  l’adresse de ses collègues de la majorité le député Marc Bernier (UMP,  Mayenne). En écho, Yves Bur (UMP, Bas-Rhin) a indiqué que cette mesure  va « alourdir le coût des complémentaires pour l’ensemble de nos  concitoyens ».

Un « choix injuste », a jugé Jean Launay (Socialiste,  Lot). Même tonalité chez Michel Liebgott (Socialiste, Moselle) qui a  condamné cette mesure « profondément immorale » qui va « accentuer » les  inégalités sociales de santé. Pour Pierre-Alain Muet (PS, Rhône), « ce  n’est pas en empêchant les personnes modestes d’aller se faire soigner  que l’on réglera le problème de la dette ».

« Les bénéficiaires des  mutuelles sont les classes moyennes et les plus faibles. Vous n’avez  donc pas d’état d’âme à taxer les mutualistes ! », s’est insurgé Henri  Emmanuelli (Socialiste, Landes).

« Recalibrer » l’aide à la complémentaire santé
Pour sa part,  Thierry Benoit (apparenté Nouveau Centre, Ille-et-Vilaine) regrette que  le plan de rigueur du gouvernement « n’aille pas chercher l’argent là ou  il est ». En guise d’illustration, le doublement de la TCA rapportera à  l’Etat 1,1 milliard en année pleine quand la taxe de 3 % sur les revenus  supérieurs à 500 000 euros annuels n’engendra que 200 millions d’euros !  De surcroît, a rappelé Jean Mallot (PS, Allier), un récent rapport de  l’Inspection générale des finances (IGF) montre que la fiscalisation  allégée des contrats responsables et solidaires constituait une « niche  efficiente et vertueuse ».

« Il n’y pas de trésor caché au sein de  la Mutualité. Dès lors, cette mesure est bien une taxe sur les ménages »,  a fait valoir Jérôme Cahuzac (PS, Lot-et-Garonne). Une analyse qui  n’est visiblement pas partagée par le rapporteur général de la  commission des finances : « Je ne dis pas que la nouvelle augmentation ne  sera pas du tout répercutée mais il y a des marges de manœuvre chez les  assureurs fussent-ils mutualistes », a affirmé Gilles Carrez (UMP,  Val-de-Marne). Décidément, les préjugés ont la vie dure !

Pour  limiter l’impact de la hausse sur les ménages, Gilles Carrez avance une  piste. Il propose de « recalibrer » l’aide à l’acquisition d’une  complémentaire santé (ACS) lors de l’examen du projet de loi de  financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2012.

Pierre  Méhaignerie (UMP, Ille-et-Vilaine) a d’ores et déjà prévenu qu’il  déposerait un amendement « pour que l’ACS soit plus importante ». Mais,  comme l’a fait remarquer Jean Mallot, l’ACS est financée par le fonds  CMU… lequel est totalement abondé par les complémentaires ! C’est donc  toujours la solidarité entre adhérents mutualistes qui est sollicitée à  la place de la solidarité nationale !

Le projet de loi  rectificatif est examiné à partir de ce jeudi 8 septembre par les  sénateurs. Le gouvernement reste déterminé : « Nous n’avons pas d’états  d’âme ni d’interrogations sur le principe », a déclaré aux députés le  ministre de l’Economie, François Baroin. Pour lui, l’exonération  partielle de TCA est une « niche » comme les autres…

Jean-Michel Molins