Pollution, pesticides, plastifiants, parabènes, métaux lourds… Quels risques pour l’homme ? Comment les éviter ?

Mercredi 30 novembre, la Mutualité Française Bourgogne a organisé la conférence « Santé et environnement : quels risques ? Comment se protéger ? » au Conseil Régional de Bourgogne, à Dijon. Plus de 150 personnes étaient venues pour comprendre le lien entre la dégradation croissante de notre santé (perturbations endocriniennes, cancers, maladies respiratoires etc.) et la toxicité de notre environnement, au sens large du terme.

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Dans un premier temps, le toxicologue André CICOLELLA, porte-parole du Réseau Environnement-Santé, est intervenu sur la question des perturbateurs endocriniens : « nous avons aujourd’hui tous les éléments pour comprendre les raisons, ou en partie, de la contamination de la population et des impacts sanitaires. Mais il n’y a pas de fatalité nous pouvons agir « , a-t-il annoncé. Ce lanceur d’alerte a salué la première initiative des députés qui ont voté à l’unanimité, le 12 octobre 2011, « l’interdiction du bisphénol A dans les contenants alimentaires ». Cette hormone de synthèse est utilisée depuis plus de 50 ans principalement pour fabriquer des plastiques. On la retrouve notamment dans beaucoup d’appareils domestiques, de matériel médical, d’instruments de musique, dans l’alimentation, dans certains sérums dentaires et dans la poussière domestique. Une autre source de contamination importante provient des boîtes de conserve, dont « le revêtement intérieur en résine epoxy (polymère) est une source de contamination quasi-totale de la population. » Les effets oestrogéniques du Bisphénol étant connus depuis 1993, « on aurait déjà dû prendre des mesures à cette époque », déplore André Cicolella. Mais depuis 2007, des expériences scientifiques ont contribué à démontrer que « le bisphénol A est impliqué dans des cancers du sein, de la prostate, des diabètes de type II, dans l’obésité, l’atteinte à la reproduction et certains problèmes neuro-comportementaux », a-t-il indiqué. « Plus grave encore », s’alarme-t-il, « alors que 95% des études scientifiques, publiées depuis mai 2009, démontrent des effets négatifs sur l’animal, même à faible dose, l’industrie plastique et les agences françaises et européennes ont continué à développer un discours sur l’absence de toxicité du bisphénol A ».

« La bonne nouvelle c’est qu’on peut AGIR ! a-t-il encouragé. C’est un enjeu urgent qui passe par la sensibilisation, la prévention et l’information des citoyens. »

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C’est ensuite l’influence des changements climatiques sur notre santé qui a fait l’objet de l’intervention du Professeur Jean-Pierre BESANCENOT, ancien Directeur de recherche en climatologie au CNRS. « Notre santé est sous la dépendance du climat, annonce celui-ci. Dès lors, les changements climatiques provoquent des répercussions sur notre santé. Certaines conditions sont plus ou moins favorables aux maladies graves, aux allergies et à l’asthme. »  « Si on ne fait rien, une canicule comparable à celle de 2003, survenant d’ici à une quarantaine d’années, pourrait faire 60 000 victimes du seul fait du réchauffement », alerte-t-il. Il a ensuite insisté sur les risques allergiques liés au pollen, qui est rappelle-t-il « la substance mâle des végétaux », et les risques liés aux spores, cellules reproductrices des moisissures.

« Comme la température agit sur la croissance et la floraison des plantes, l’évolution la plus perceptible concerne l’apparition de plus en plus précoce dans l’année du pollen », informe Jean-Pierre Besancenot. En à peine 40 ans, le début de la pollinisation s’est avancé d’un mois. Le second problème est que la saison pollinique s’allonge : « En une vingtaine d’années, la saison des pollens s’est allongée en moyenne de 10 jours. En 2010, elle aura ainsi duré plus de 90 jours ». « Parallèlement, poursuit-il, les quantités de pollens libérés dans l’air augmentent et renferment de plus en plus d’allergènes ».

Enfin les spores de moisissures. « Elles sont moins étudiées que les pollens sous l’angle de leur sensibilité au changement climatique, indique-t-il, mais peuvent néanmoins provoquer des rhinites, conjonctivites et asthmes. Ces champignons microscopiques se développant de préférence dans des endroits humides, les phénomènes de réchauffements climatiques et d’inondation favorisent donc largement la prolifération des moisissures, à l’intérieur comme à l’extérieur. « Le changement climatique, conclut-il, commence à avoir des conséquences sur le risque d’allergie. Il est fort probable que celles-ci se renforcent dans l’avenir. »

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Enfin, le Professeur Philippe BONNIAUD, pneumologue au CHU de Dijon a évoqué la thématique « Asthme et allergies : quelle influence de l’environnement ? ».  Il commence par cette bonne nouvelle : « on observe depuis les années 80, une diminution de la mortalité par asthme ». En effet les traitements permettent désormais de soigner cette maladie qui touche 6,25 millions de personnes en France et 300 millions dans le monde. Il mentionne les coûts élevés engendrés par cette maladie. La responsabilité de la pollution de l’air dans le fait de devenir allergique ou asthmatique est très compliquée à démontrer. « Mais les études plus récentes tendent à prouver la responsabilité de la pollution, contrairement aux études plus anciennes », avance-t-il prudemment. De même, le tabac ne peut être considéré « comme un élément pouvant induire des maladies allergiques, écarte-t-il. On sait qu’il les aggrave mais il n’en est pas à l’origine. »

Chez des sujets déjà malades, des études ont démontré les effets négatifs des pics de pollution et de l’environnement intérieur (acariens, animaux, blattes, composés organiques volatiles – dits COV, etc.). Des mesures simples permettent de limiter la concentration des allergènes et des moisissures et d’améliorer ainsi significativement la santé des personnes sujettes à l’asthme et aux allergies. « Même si ces études présentent des incertitudes et sont difficiles à mener, conclut le professeur Bonniaud, on est certain du rôle des allergènes et polluants. Il est aujourd’hui possible de dépister des problèmes à domicile et de prendre des mesures d’éviction efficaces ». C’est le rôle du service Conseil Médical en Environnement Intérieur (CMEI) crée par la Mutualité Française Bourgogne.

A l’issue de ces interventions, Nicole BOUKHEROUFA,  coordinatrice régionale du service Prévention et promotion de la santé à  la Mutualité Française Bourgogne, a proposé des pistes et alternatives  simples pour améliorer nos gestes santé au quotidien. La  liste des substances nocives pour l’organisme n’a de cesse de  s’allonger. Mais, point encourageant, à l’image des parabènes,  aujourd’hui connus de tous, elles sont désormais un argument marketing  sur certains produits fièrement étiquetés par exemple « sans parabènes ».  « Vous voyez que les consommateurs, interpelle-t-elle, peuvent faire  changer les industriels!  » D’où la nécessité de changer les  comportements en matière de consommation, que ce soit de produits  d’entretien, de cosmétiques ou d’alimentation.